
Comme dans les meilleures séries, la défaillance de Thomas Cook France a tenu en haleine la profession durant des semaines. En exclusivité, Nicolas Delord a raconté à Tour Hebdo comment a été vécue la crise, de l’intérieur.
Précédemment : Dans les quatre premiers épisodes, « La chute », « La gestion de la crise », « Jet tours et l'offre managériale » et « Les institutions et la réglementation », Nicolas Delord revenait sur le 23 septembre 2019, le jour où tout a basculé pour Thomas Cook France, avant de s'expliquer sur l'erreur commise par la banque, les choix de communication du top management ou encore les décisions prises. Il a aussi révélé à Tour Hebdo les coulisses de l'offre managériale pour tenter de reprendre le tour-opérateur Jet tours et ses équipes. Puis, Nicolas Delord est revenu sur le rôle de l'APST dans la gestion de la crise et la nécessité, selon lui, de revoir la réglementation qui encadre le tourisme. Aujourd'ui, c'est un nouvel aspect qu'il révèle.
Épisode 5 : Les états d'âme et les bons moments
Mettre de côté ses états d’âme
« Je me suis investi dans cette procédure pour aller au bout de ce qui pouvait être sauvé et pour cela je me suis mis en mode robot. Pas déshumanisé mais en me concentrant sur ce qui était vital, prioritaire, comme une machine de guerre, travaillant jusqu’à 18 heures par jour. Le 23 septembre, je me suis dit "On va se sortir de cette m…" et j’ai avancé sans état d’âme. Ce n’est pas évident. La famille ne comprend pas toujours. Elle voudrait en parler, comprendre, savoir mais c’est comme une cicatrice ouverte et en rentrant à la maison le soir on voudrait justement passer à autre chose. Là aussi, ça a généré de l’incompréhension. Tout le monde a trinqué d’autant que la presse n’a pas forcément été tendre. »
Apprendre (beaucoup) sur les autres
« J’ai vécu la période la plus difficile, la plus dure mais aussi la plus riche professionnellement de ma vie. J’ai appris beaucoup sur les gens, avec de bonnes surprises et des déceptions immenses. J’ai vu des courageux, des faibles, des stressés, des généreux, des individualistes, des égoïstes. J’ai vu comment une crise agissait sur les comportements humains. C’est une expérience humaine exceptionnelle. Je ne souhaite à personne de vivre cela ni à aucune entreprise de traverser une telle épreuve. Mais je souhaite à tout le monde de connaître une telle expérience. C’était épuisant mais passionnant. Cela restera les heures les plus riches de ma vie professionnelle. »
Pas que des mauvais moments
« Il y a eu aussi des moments de grand kif. Depuis les différents profit warnings [avertissements sur les bénéfices, quand les résultats d'une entreprise côtée sont décevants, NDLR] du groupe, tout était sclérosé, le reporting et les procédures très lourds. L’ambiance aussi. Le 23 septembre, on s’est retrouvé orphelins mais avec les mains libres et le total contrôle de l’entreprise. Les décisions bonnes ou mauvaises étaient les nôtres. On a fait du mieux possible en y mettant tout notre cœur. On a commis des maladresses mais on a agi avec passion, énergie, engagement tout en sauvant 350 postes. Ce n'est pas autant qu'on le souhaitait bien sûr on aurait préféré en sauver beaucoup plus. »
À suivre... Dès lundi, retrouvez l'épisode 6 "Thomas Cook aujourd'hui... et après ?" de notre série "L'affaire Thomas Cook France".
=> En attendant, (re)découvrez les épisodes précédents :
- Épisode n°2 : La gestion de la crise