Mercredi, c'est permis ! Thierry Beaurepère est de retour pour vous faire part de son humeur du moment. Cette semaine, il souffle à l'oreille des "gilets jaunes" une nouvelle revendication...
Tout et son contraire ! Les revendications des "gilets jaunes", et plus globalement des Français si l’on en croit les sondages, ressemblent à une interminable liste de cadeaux de Noël qui rend la sortie de crise bien incertaine. Même Prévert - pourtant jamais en manque d’imagination - n’aurait réussi plus bel inventaire...
Je vous passe les déclarations de quelques hommes - et femmes - politiques revanchards qui jettent de l’huile sur le feu en espérant que leur grand soir est arrivé. Et je vous passe les revendications les plus farfelues ; celle du droit au chèque vacances pour les élus (!) ou celle d’un "gilet jaune" qui demande la nomination de l’ex-général Pierre de Villiers au poste de Premier ministre. Et pourquoi pas l’armée au pouvoir ? Voilà au moins qui remettrait un peu d’ordre dans cette chienlit !
La Confédération des Acteurs du Tourisme a récemment dénoncé les conséquences des manifestations des "gilets jaunes" sur l’image de la France. A juste titre ! Car qui peut avoir envie de venir passer les fêtes de Noël à Paris après avoir vu les images enflammant la capitale ? Si le tourisme réceptif va indubitablement souffrir, les plus cyniques pourront toujours rappeler que le climat insurrectionnel actuel favorise aussi l’envie d’aller voir ailleurs, et donc le tourisme émetteur ! Encore faut-il réussir à rejoindre son agence de voyages…
20% des agents de voyages au Smic
Trêve d’humour noir ! Il est temps d’oublier les invités des plateaux de télé qui ne représentent qu’eux mêmes et ne rêvent que de renverser le gouvernement, pour se recentrer sur les vraies difficultés des Français. Car comment nier les légitimes revendications sur le pouvoir d’achat ? Les agents de voyages sont les premiers concernés, même s’ils ne portent pas de gilet jaune pour recevoir leurs clients en partance pour l'île Maurice ou les Caraïbes…
L’été dernier, les chiffres révélés par Tour Hebdo dans une enquête sur les salaires de la profession étaient édifiants. Près de 20% des vendeurs gagnent le Smic et les deux tiers doivent se contenter d’une rémunération brute inférieure à 1 900 €. Quant aux augmentations, elles se font au compte-goutte. « Vingt ans dans le tourisme et toujours pas les moyens de partir en vacances ! », témoignait même une vendeuse.
Le tourisme français a oublié une partie de la population
Plus globalement, les vacances en disent long sur l’évolution de notre société. Le taux de départ de nos compatriotes, qui avait fortement augmenté après les Trente Glorieuses pour culminer à 65% dans les années 90, ne progresse plus. Même si la dernière enquête du cabinet Raffour Interactif fait état d’une reprise en 2017, quatre Français sur dix n’ont pas les moyens de partir en vacances. Surtout, les écarts se creusent selon les milieux sociaux. « Parmi les ménages modestes, seuls ceux qui disposent d’un hébergement gratuit ou qui sont aidés par un comité d’entreprise peuvent encore s’offrir des congés », note le Crédoc.
L’Etat s’est progressivement désengagé du tourisme social, remplacé par les collectivités locales aux moyens disparates. Où sont les jolies colonies de vacances d’autrefois (« merci papa, merci maman ! ») qui donnaient aux enfants des classes populaires la possibilité de voir la mer ? Où sont les campings qui permettaient aux familles de planter leur tente sans se ruiner ? Et je ne vous parle pas des sports d’hiver, dont les prix tutoient les sommets. Dans sa volonté de monter en gamme, le tourisme français a oublié une partie de la population… Voilà une revendication de plus pour les "gilets jaunes" !