Mercredi, c’est permis ! Thierry Beaurepère est de retour pour vous faire part de son humeur du moment. Cette semaine, il fait le bilan des vacances à la neige. Pas les siennes mais celles des 10% de Français qui ont le privilège de partir aux sports d’hiver sous le regard bienveillant des JT...
Chouette, les vacances d’hiver sont enfin terminées… Un mois que ça dure, toutes zones confondues. Il était temps ! Je sais, il n’est pas de bon ton, lorsqu’on travaille dans le tourisme, de tuer "la poule aux yeux d’or" comme disait César Balderacchi, le président de feu le Syndicat National des Agences de Voyages. Car ce calendrier à rallonge – ardemment défendu par les hautes instances de la profession - permet de remplir les avions et de vendre des forfaits plein pot.
Ne vous y méprenez pas, je ne fais pas partie de cette frange de la population angoissée à l’idée de partir en vacances. Moi aussi, je milite ardemment pour mes cinq semaines de congés payés ! Non, ce qui m’énerve avec les vacances de février, c’est ce matraquage permanent de la part de nos stations de sport d’hiver ; un lobbying qui se traduit par une avalanche de communiqués de presse sur les joies de la glisse, des alertes SMS à chaque centimètre de poudreuse et des bulletins d’enneigement chaque soir à la télé.
Le must, c’est sans aucun doute ces reportages au 20 heures sur les naufragés de la route qui ont oublié leurs pneus neige et sur les soirées démentielles dans les palaces de Courchevel ; ces sujets "vécus" sur l’arrivée d’une famille moyenne dans sa station préférée un samedi de février, depuis la découverte de l’appartement décoré "façon chalet rustique" jusqu’aux courses chez Sherpa, le supermarché sympa ; en passant bien évidemment par la descente de luge du petit (comme il est mignon !) et la leçon de ski avec le moniteur beau gosse de l’ESF ! Bref, ces reportages sur Bernard et Nathalie Morin, alias Gérard Jugnot et Josiane Balasko dans "Les bronzés font du ski". Et vive le planté de bâton !
Smicards et classes de neige sont hors-piste
Enfin, famille moyenne ? Aujourd’hui, à peine 10% de la population française part aux sports d’hiver au moins une année sur deux. Peut être parce que les 90% restants n’aiment pas les odeurs de chaussettes se mêlant à celles de la raclette ; ou plus sûrement parce qu’ils n’ont pas les moyens de s’offrir des vacances à la neige, même en s’entassant à six dans un studio-cabine. Il faut dire qu’à 200 € le forfait ski pour une semaine, ça fait cher le droit de se faire tirer les fesses…
Certes, les chiffres récents dévoilés par l’Observatoire National des Stations de Montagne font état de bons résultats pour cet hiver, dopés par l’enneigement exceptionnel. Pour autant, le ski reste un sport élitiste, le smicard demeure hors piste. Et les classes de neige qui permettaient autrefois aux enfants de familles modestes de découvrir les joies des sports d’hiver ont fondu… comme neige au soleil.
Du coup, on peut s’interroger sur la pertinence de ce bourrage de crâne médiatique, de ce matraquage déconnecté de la réalité, de ces "people" qui pensent que – comme eux – tous les Français achèvent le mois de février avec le teint hâlé.
Allez, vivement les vacances d’été. Le taux de départ en juillet/août flirte avec les 65%. Au moins, avec les reportages sur les bouchons de l’A7 et les glaces à l’eau sur la plage de Palavas-les-Flots, les médias seront dans le (juste) ton !