Le mercredi, c'est permis ! Thierry Beaurepère est de retour pour vous faire part de son humeur du moment. Cette semaine, il revient sur les records de fréquentation battus dans certains pays... y compris en France, en dépit du mouvement des "gilets jaunes".
L’époque des vœux n’est pas encore terminée qu’il est temps de dresser les bilans (de 2018). Et l'année dernière, comme dans L’École des Fans, tout le monde a gagné ! Une fois de plus, l’Organisation Mondiale du Tourisme se frotte les mains, avec 1,4 milliard de touristes recensés sur la planète en 2018, en hausse de 6%. Dans ce contexte dynamique, tous les pays sont à la fête si l’on en croit les communiqués euphoriques qui tombent à la pelle dans ma boîte mail.
Du Japon, qui vient d’interdire la vente de revues porno dans les supérettes pour ne pas choquer les touristes (sic !) à la République dominicaine qui n’a jamais accueilli autant de Français (221 000) qui peuvent encore se rincer l’œil sur les plages, de l’Allemagne aux riches cochonnailles jusqu’au Pérou où l’on préfère déguster le cochon... d’Inde, les records pleuvent, aussi nombreux qu’au sein de l’équipe olympique de Russie. Et sans produits interdits !
90 millions de touristes en France, un record !
Et la France dans tout ça ? Les esprits chagrins et les complotistes du tourisme remettront en cause le chiffre de 90 millions de touristes étrangers attendus en 2018 (contre 87 millions en 2017) dévoilé il y a quelques jours. On connaît la chanson : l’estimation se ferait au doigt mouillé et les chiffres seraient "dopés" par les Européens du Nord qui se contentent de traverser notre beau pays à tombeau ouvert pour s’entasser sur les plages d’Espagne.
Pas totalement faux ! Rappelons toutefois que l’Insee fait preuve d’un réel savoir-faire dans le comptage des visiteurs et qu’à l’heure de la libre circulation, à moins de s’appeler Chypre ou Malte, les autres pays européens sont confrontés à la même difficulté. Rappelons aussi que pour être comptabilisé comme "touriste", il faut séjourner au moins une nuit sur place, même dans un motel économique. Pas assez pour faire bondir notre balance des paiements mais suffisant pour remplir le tiroir-caisse des stations services et des supermarchés vendant des sandwichs sous cellophane !
L'effet "gilets jaunes" s'atténue à l'étranger
On aurait pu croire que les "gilets jaunes" porteraient un coup à notre tourisme en fin d’année. Mais Aéroports de Paris annonce une hausse de trafic de 3,2% en décembre comparé à 2017 (sans doute lié davantage aux flux sortants qu’au tourisme réceptif). De son côté, Atout France évoque une baisse des arrivées internationales à Paris en décembre (un mois de basse saison), de l’ordre de 5 à 10%. L’impact est donc finalement moindre que redouté.
D’abord parce qu’au déclenchement du mouvement, nombre de touristes avaient déjà réservé et qu’ils ne pouvaient plus annuler. Ensuite parce si nos télévisions tournent en rond depuis novembre, les gilets jaunes n’ont plus le droit — au mieux — qu’à quelques entrefilets à l’étranger. Il faut s’y faire : la France n’est pas le centre du monde et nos problèmes de fins de mois n’émeuvent guère les habitants des favelas brésiliennes !
Le danger serait que les étrangers boudent la France dans les prochains mois. Mais pour l’heure, pas de panique ! En léger recul depuis le début de l’année, les chiffres repartiraient à la hausse en mars. Et qui sait, avec l’arrivée du printemps, le jaune deviendra peut-être même tendance ! Dans les boutiques de souvenirs, on trouve désormais des porte-clés siglés "GJ" ; et à la Fashion Week qui se déroule à Paris cette semaine, quelques illuminés osent le fameux gilet, tricoté ou brodé ! A quand un défilé Jean-Paul Gaultier avec Eric Drouet en guest star ?