Pavlovien. Un an et demi après Charm el-Cheikh, nos chers médias (télé surtout) ont entonné en chœur leur refrain favori dès que les catastrophes aériennes s’invitent à la grand-messe de l’information. Tout y est passé : amalgames, confusions, raccourcis… Un vrai festival d’approximations et d’imprécisions. La recette est désormais connue : vous prenez un peu de régulier, un zeste de charter et une pincée de low cost. Vous mélangez le tout et ça donne un cocktail détonnant, prompt à foutre la trouille au plus zen des passagers. Et si ça ne suffit pas, n’hésitez pas à fustiger l’attitude irresponsable de l’agence de voyages ou du tour-opérateur (appelés indifféremment « voyagistes »), histoire de pimenter encore un peu plus le breuvage. Dans ce concert moutonnier, une seule voix discordante : celle de la chaîne Arte qui a diffusé mardi dernier deux excellents documentaires au cours d’une soirée intitulée « Pourquoi les avions tombent-ils ? » Comme l’écrivait Le Figaro, le bon titre aurait d’ailleurs été : « Pourquoi les avions tombent-ils si peu ? » Car en effet, et cette émission le montrait avec beaucoup de pertinence, aucune autre industrie au monde ne peut se targuer d’autant de précautions et de rigueur en matière de sécurité que le transport aérien. Alors pourquoi tant de catastrophes ces dernières semaines, me direz-vous ? Si les normes de sécurité ne manquent pas, le problème, c’est leur respect et leur contrôle. Et là, d’un pays à l’autre, c’est le grand écart. On estime à une trentaine le nombre d’Etats défaillants dont certains européens. Que faire contre ces mauvais élèves ? Le fameux label Bleu décidé par Gilles de Robien est mort-né : entre l’annonce de sa création et aujourd’hui, il est non seulement devenu facultatif pour les compagnies mais, en plus, la sécurité n’est déjà plus au cœur du dispositif. Autant dire qu’il ne servira à rien, à part n’être qu’un simple argument commercial pour certains. La seule façon de forcer les Etats réticents à se mettre au niveau, c’est d’établir une liste noire des mauvaises compagnies comme il en existe aux Etats-Unis. Elle seule apportera les garanties nécessaires au moment où le transport aérien va devoir s’adapter au plus vite à l’explosion du trafic mondial. Elle seule pourra notamment rassurer les touristes dont les exigences en matière de sécurité sont légitimes. Le hic, c’est qu’une telle liste demanderait à nos gouvernants de passer outre les contingences diplomatiques et politiques, quitte à se fâcher avec un Etat ami. Lequel d’entre eux aurait ce courage ?