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Bruno Delavenne, président du comité des parcs et jardins de France

Bruno Delavenne, « Un jardin ne souffre pas d’être médiocre

Entretien | publié le : 01.12.2019 | Dernière Mise à jour : 09.12.2019

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  • Nathalie Moreau

» Amoureux des jardins de sa région – et de tant d’autres –, Bruno Delavenne est à la tête de l’Association des parcs et jardins de Haute-Normandie depuis une quinzaine d’années. Il est aussi aujourd’hui président du Comité des Parcs et Jardins de France.

Le Comité des Parcs et Jardins de France fédère de nombreuses associations. Pouvez-nous parler de sa création et de ses différentes missions?

> En 1990, il y avait déjà un fort engouement pour les parcs et jardins de la part du public Le CPJF a été créé cette année-là par l’Association des parcs botaniques de France, les Vieilles Maisons françaises et La Demeure historique. À l’époque, quelques associations étaient nées localement, notamment en Bretagne, en Normandie, en Sarthe. Elles ont été à l’origine de la création du CPJF. Les élus également ont beaucoup œuvré pour que ce comité voie le jour. Il y avait nécessité à protéger les parcs et jardins en les fédérant à travers toute la France.

> Le CPJF réunit aujourd’hui six associations nationales et trente-six régionales et départementales afin de définir avec elles les besoins spécifiques des propriétaires privés et des responsables de parcs et jardins et de les représenter auprès des administrations régionales, nationales et internationales. Nos associations sont souvent réparties en deux catégories de membres: les propriétaires de parcs et jardins et les amateurs. Ces derniers sont des passionnés auxquels on propose régulièrement des visites de jardins dans leurs régions et des voyages plus lointains, en Europe, en Chine… La principale mission du CPJF est de sauvegarder et valoriser les parcs et jardins. Nos activités s’organisent ainsi pour développer la connaissance des parcs et jardins, leur protection et celle de leur environnement, leur richesse botanique, la mise en valeur de leurs éléments remarquables, les conditions économiques et leur pérennité et bien sûr la promotion des parcs et jardins pour ceux qui acceptent de s’ouvrir au public.

> Pour attirer le public, nous participons à des journées des plantes, des salons spécialisés sur l’art des jardins en France et à l’étranger (Grande-Bretagne, Belgique…), nous distribuons également des brochures via les offices de tourisme. Notre site internet www.parcsetjardins.fr est aussi un très bon outil de promotion. Il répertorie 1533 jardins avec leur descriptif, historique et informations pratiques ainsi que toutes les manifestations qui leur sont liées.

(Parc du château Champs de Bataille)
Jardins, parcs, potagers, arboretums, journées des plantes, festivals… Le marché du tourisme botanique en France est en plein boom. Que représente-t-il exactement?

> C’est une question très difficile car nous avons beaucoup de mal à avoir des chiffres. Pour la simple raison que de nombreux jardins n’ont pas d’entrée payante ou n’ont pas forcément l’organisation pour les comptabiliser rigoureusement. Il est donc compliqué de quantifier le nombre de visiteurs. Il s’agit souvent d’amateurs ou de collectionneurs qui ont créé leur propre jardin qui sont d’un grand intérêt botanique mais qui font cela pour leur plaisir ou qui ne souhaitent pas être fédérés.

> En revanche, de par nos associations, nous pouvons dire que les visiteurs passionnés, amateurs de jardins représentent un bon tiers du public. On note aussi également une évolution de la clientèle étrangère selon les régions et les flux de circulation: par exemple, les Anglais et les Néerlandais sont très présents en Normandie. Une chose est certaine, l’expansion d’ouverture de jardins est phénoménale depuis quelques années. On peut évaluer à plus de 3000 le nombre de jardins ouverts au public sur le territoire national.

La manifestation Rendez-vous aux jardins initiée par le ministère de la Culture tiendra en juin prochain sa 18e édition. Pouvez vous nous la présenter en détail?

> Il est certain que l’ampleur de manifestations comme Rendez-vous aux jardins, qui a attiré cette année 2,5 millions de personnes dans toute la France sur seulement trois jours nous conforte aussi dans l’idée qu’il y a un véritable amour pour les parcs et jardins. L’édition 2020, qui se tiendra du 1er au 3 juin, aura pur thème: « La Transmission des savoirs ».

> Chaque année, le CPJF contribue à la préparation de Rendez-vous aux jardins, avec le ministère de la Culture. Pour mémoire, Rendez-vous aux jardins propose à tous les publics, initiés et néophytes de tous âges, des découvertes et des rencontres exceptionnelles dans plus de 2 000 parcs et jardins, historiques et contemporains, et les convie à participer à des milliers d’animations (près de 4 000 l’an dernier): visites guidées, ateliers, concerts, démonstrations de savoir-faire, bourses d’échange… Ces rendez-vous ont pour objectif de faire découvrir au public le panorama des jardins en France (jardin classique, jardin paysager, jardin vivrier, jardin contemporain…), de sensibiliser les visiteurs aux nombreuses actions mises en œuvre pour favoriser la connaissance, la protection, la conservation, l’entretien, la restauration, la création de jardins ainsi que la transmission des savoir-faire, de créer des rencontres et des échanges ludiques et pédagogiques entre le public et les acteurs du jardin: jardiniers, propriétaires, privés et publics…

> L’an dernier, le ministère avait mis en place les pass Rendez-vous aux jardins incitant trois structures d’un même secteur géographique à se regrouper pour mettre en place des offres privilégiées sur la visite de leurs jardins: 30 % sur le tarif habituel pour la première visite, puis 50 % sur le tarif des deux jardins suivants. Un bel outil de promotion pour inciter le public à poursuivre leur découverte de jardins.

> Pour des groupes, il est intéressant lors d’une journée de visite de coupler plusieurs jardins différents. En Normandie, par exemple, le château du Champ-de-Bataille et ses grands jardins sont souvent suivis d’une visite à quelques kilomètres de La Mare aux Trembles, un charmant jardin d’un hectare créé par un couple de passionnés. Les groupes apprécient de changer totalement d’univers en seulement quelques minutes.

(Fondation Monet à Giverny)
Le Comité des Parcs et Jardins de France participe également à l’attribution du label « Jardin Remarquable ». Comment cela fonctionne-t-il?

> Le CPJF collabore avec le ministère de la Culture à l’inventaire des « Jardin Remarquable ». Ce label a été mis en place en 2004 afin de valoriser des jardins publics ou privés, présentant un intérêt culturel, esthétique, botanique ou historique. Le label est attribué selon des textes légaux relatifs à l’entretien, la qualité, l’accueil et les éléments remarquables. Le label est attribué pour une durée de cinq ans. Un jury composé de six personnes doit donc visiter les jardins régulièrement. C’est un énorme travail auquel nous participons via les délégués de nos associations régionales. Le label compte actuellement 422 « Jardin Remarquable » dont 10 aux Antilles et à La Réunion.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles doivent faire face les parcs et jardins?

> Pour être très clair, il faut être fou aujourd’hui pour entretenir un parc ou un jardin. C’est un gouffre sur le plan économique. Bien sûr il y a des exceptions comme les jardins de Chaumont, ceux de Giverny et bien d’autres. Durant quelques années, les propriétaires de « Jardin Remarquable » avaient un agrément fiscal, dont ils ne bénéficient plus actuellement. C’est l’un des dossiers sur lequel j’ai déjà commencé à travailler. J’espère que nos efforts porteront leurs fruits. C’est une nécessité. Les jardins protégés en France sont essentiellement privés. Un jour, ils ne pourront plus ouvrir au public et la dégradation survient très vite. C’est un patrimoine commun qui se perd. Un jardin ne souffre pas d’être médiocre. Le public peut être sans pitié.

> C’est aussi la hantise de la transmission. C’est aujourd’hui rarissime que les enfants reprennent la gestion d’un jardin lorsque le propriétaire décède. Il faut regarder la réalité. Certes, il y a des créations tous les jours mais il y en a autant qui disparaissent.

> Il ne faut pas oublier qu’un jardin est éphémère. Si l’on doit distinguer un parc et un jardin, on peut dire qu’un parc peut survivre à des événements, des périodes d’abandon comme la guerre ou autres. Un jardin, c’est impossible. S’il n’est pas entretenu durant six mois, c’est fini. Un jardin est un spectacle à un temps donné, dans un état donné. C’est offrir un spectacle de luxe, à des tarifs souvent ridiculement bas lorsque l’on sait ce que coûte l’entretien d’un jardin. Les amateurs de jardin visent toujours la perfection, les propriétaires comme le public sont exigeants.

Que peut-on dire du public qui visite les jardins?

> La diversité du public qui fréquente les jardins est extraordinaire. Ce sont des personnes de tous horizons, de tous âges, passionnés ou néophytes… Les enfants qui découvrent un jardin lors d’une visite scolaire vont y revenir en famille dans les semaines qui suivent. Le jardin est une utopie, il a cette faculté à offrir du rêve. Il offre un moment hors du temps et d’évasion. On peut apprécier plus ou moins un jardin, mais tous éveillent de la curiosité, du respect et de la passion.

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