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Haro sur le surtourisme, une fatalité ou une opportunité

Enquête | publié le : 01.12.2019 | Dernière Mise à jour : 09.12.2019

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  • Bruno Courtin

Depuis quelques années, chaque début de haute saison touristique est illustré par des images récurrentes de sites envahis, de bousculades devant LA merveille à photographier, d’attroupements inextricables, faisant douter du bien-fondé d’accueillir autant de visiteurs.

Dans ces conditions-là, quelle(s) image(s) peuvent-ils garder d’une destination et quelles conséquences durables s’abattent sur la vie des habitants, sur la protection des sites et sur l’équilibre économique? La croissance continue des flux touristiques conduit à s’inquiéter d’un phénomène qui pourrait devenir destructeur. Mais fatalité ou opportunité, c’est toute l’ambiguïté du surtourisme qui peut être vu comme un drame ou une chance, pour peu qu’il soit maîtrisé et réorienté vers des lieux qui sont en attente de visiteurs. La France, avec ses 90 millions de séjours internationaux enregistrés en 2019, a sans doute une carte à jouer.

Le surtourisme existe et de nombreuses villes ou sites l’ont rencontré. Pour l’instant, on en reste surtout à l’ère du constat et aux interrogations pour savoir comment s’en dépêtrer. Les solutions oscillent entre punition et restriction, entre taxe et réglementation. Les groupes sont en ligne de mire, plus visibles que les touristes individuels alors qu’ils sont sans doute plus faciles à gérer. Mais la tentation d’en limiter la venue ou la taille semble trouver un écho chez les autorités locales, solution de facilité plutôt que recherche d’efficacité.

Face à un phénomène réel, qui a pris de court les gestionnaires de sites, on peut comprendre les réactions épidermiques et les images sont impressionnantes à travers la France, l’Europe et le monde. Des musées sont contraints de refuser du monde pour ne pas encombrer davantage leurs galeries. À Paris, le Louvre (musée le plus visité au monde) institue de plus en plus la réservation de visite en ligne. C’est une piste qu’a déjà emprunté depuis longtemps le château de Versailles et qui favorise plutôt le tourisme de groupe, mieux à même de programmer son (ses) parcours.

Il faut déjà être conscient que la question ne pourra se résoudre d’elle-même par une forme de stabilisation naturelle, sauf à vouloir dégoûter définitivement les touristes de voyager. Les chiffres donnent déjà le vertige, la barre du milliard de voyages internationaux a été franchie en 2016 et le rythme a plutôt tendance à augmenter. 1,4 milliard, c’est le nombre de déplacements internationaux enregistré en 2018, selon le baromètre annuel de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT). L’organisme des Nations-Unies s’attendait à franchir ce cap en 2020, mais ses prévisions se sont réalisées avec deux ans d’avance.

Les arrivées de touristes internationaux ont augmenté de 6 % en 2018, c’est la plus forte croissance de ces dix dernières années. Une tendance qui devrait se poursuivre dans les années à venir à un rythme moins soutenu (entre 3 et 4 %).

L’abondance peut-elle nuire?

L’Europe est la destination préférée des voyageurs avec 713 millions de visiteurs internationaux, suivie de l’Asie-Pacifique (343 millions), des Amériques (217 millions), de l’Afrique (67 millions) et du Moyen-Orient (64 millions). Dans plusieurs villes européennes, la lutte contre le surtourisme est une priorité. Car 95 % des voyageurs vont dans 5 % de la planète, selon l’Organisation mondiale du tourisme.

D’ici à 2030, le nombre de voyages internationaux devrait grimper à 1,8 milliard. La bonne nouvelle est que ce chiffre s’accompagne aussi d’une augmentation conséquente des dépenses et donc des retombées économiques du tourisme. Le secteur est économiquement l’un des plus solide au monde. On évalue le chiffre d’affaires international du tourisme (dépenses faites par les nationaux dans un autre pays que le leur, sans prendre en compte le transport) à 1,5 trilliard de dollars, 1 500 milliards de dollars, en hausse de 4 % annuellement en moyenne, soit 4 milliards de dollars dépensés en moyenne chaque jour par les voyageurs. Pour la petite histoire, les touristes chinois sont ceux qui dépensent le plus pour voyager à l’étranger, suivis des Américains, des Allemands, des Britanniques et des Français. Le tourisme est aujourd’hui le troisième secteur économique mondial après la chimie et les carburants.

L’abondance n’est pas mère de toutes les vertus, car les effets secondaires sont réels: il y a d’abord la congestion au cœur des monuments et parfois au cœur des villes entre touristes et habitants. Il suffit de voir la réaction des habitants de Barcelone, Dubrovnik ou Venise pour le constater. Victimes de leur succès, ces villes voient leur population se multiplier avec la venue des touristes, créant ainsi d’importants déséquilibres au niveau local: rues et transports surchargés, nuisances sonores, plages bondées… Près de 30 millions de personnes visitent Venise chaque année, quand celle-ci ne compte que 55 000 Vénitiens. Cela représente une proportion de 545 touristes par habitant. Plusieurs manifestations d’hostilité à l’égard des touristes ont eu lieu en Espagne ou en Italie. Les commerces de proximité cèdent la place à des bars et des boutiques de souvenirs. La prolifération d’hôtels et d’hébergements touristiques engendre une pénurie de logements pour les habitants et une hausse des prix de l’immobilier.

Le surtourisme accentue le phénomène de gentrification, le départ des classes populaires des centres-villes au profit d’une classe sociale plus aisée. Face à l’augmentation du coût de la vie, les habitants sont contraints de se loger ailleurs et les quartiers se vident de leurs habitants. Qualifié de « tourismophobie », ce phénomène de rejet du tourisme est observé depuis quelques années dans plusieurs grandes villes européennes.

Mais encore une fois, la France et notamment sa région capitale sont encore peu touchées par cette opposition naissante. Ainsi, selon une étude réalisée l’an passé par le Comité régional du tourisme d’Île-de-France, seuls 3 % des habitants sont hostiles à l’essor du tourisme, contre 20 % à Venise ou à Amsterdam.

Une pression excessive sur l’environnement

La cohabitation avec la population locale n’est pas le seul problème à résoudre, le surtourisme exerce inévitablement des pressions sur l’environnement. L’activité touristique augmente les besoins en énergie, en nourriture et eau. En mer Méditerranée, 52 % des détritus seraient liés au tourisme balnéaire selon un rapport du WWF. Certains sites ont d’ailleurs pris des mesures drastiques comme sur l’île de Boracay aux Philippines fermée six mois aux touristes, ou encore en Thaïlande, où la plus célèbre plage du pays, Maya Bay, a été fermée par les autorités jusqu’en 2021 pour permettre aux récifs coralliens de se reformer.

La suite de l'enquête dans le numéro 90 Décembre 2019 de Bus&Car Tourisme de groupe

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