Si elle revient en force en brochures et dans les réservations, la Tunisie n’est plus la destination fétiche des voyagistes qui la programment plutôt sagement cet été, à l’exception de quelques outsiders.
Après un long passage à vide, la Tunisie est revenue en force ces trois dernières saisons. Sur l’exercice 2018-2019, les ventes de forfaits ont bondi de 17% faisant de la destination la troisième meilleure vente des TO du Seto en moyen-courrier, derrière la Grèce et les Canaries, avec 196 237 pax. Elle promet d’être encore une valeur sûre de l’été, réputée compétitive avec ses « petits prix ».
« Pour le vacancier, la Tunisie reste le meilleur compromis en termes de prix-proximité-accessibilité », confirme Patrice Caradec, président d’Alpitour France (Bravo Club). En juillet-août 2019, un séjour de 7 nuits y était facturé en moyenne 705 € TTC selon le Seto, soit effectivement la recette unitaire la plus basse en moyen-courrier.
Pour autant, la destination est loin d’avoir retrouvé la place qu’elle occupait il y a 10 ans dans les carnets de commandes. Pour mémoire, au cours de l’exercice 2009-2010, les voyagistes du Syndicat des Entreprises du Tour-Operating avaient commercialisé 601 193 forfaits, soit trois fois plus que l’année dernière.
Un modèle qui a changé
« Notre préoccupation n’est pas le volume », explique Samia Benslimane, directrice générale de Thalasso n°1/ÔVoyages. « On vend moins mais avec de meilleurs prix et en misant sur la qualité. » Avec cinq clubs cet été, le TO table sur 25 000 clients en 2020, soit 25% de mieux qu’en 2019, mais loin des 80 000 des meilleures années. « C’est surtout le modèle qui a changé », précise la DG. « Le dynamique prend le pas sur l’affrètement charter et les risques aériens ne sont plus les mêmes. »
A l’exception de Mondial Tourisme et dans une moindre mesure de FTI Voyages, engagés respectivement à hauteur de 100 000 et 15 000 sièges auprès de Nouvelair et qui ont fait de la Tunisie l’une de leurs priorités de l’été, les voyagistes privilégient effectivement de plus en plus le « flexi package », à l’instar de TUI France. « Les clients nous demandent aussi la destination en 3 ou 5 nuits », détaille Samia Benslimane. « Ils veulent pouvoir choisir leur jour de départ et la compagnie », confirme TUI France qui reste cependant l’un des principaux affréteurs depuis la province.
Une équation difficile à tenir
S’ils s’engagent moins et limitent les risques, les voyagistes restent néanmoins circonspects sur la rentabilité de la destination. « Les prix de vente pratiqués sur notre marché français, hors juillet-août, génèrent du volume mais pas de marges entraînant une baisse de la qualité du produit tant les hôteliers sont contraints par le prix », regrette Patrice Caradec. Actuellement, un séjour en Tunisie se trouve facilement à moins de 300 € en prix d’appel promotionnel.
« Juillet-août doivent alors rattraper toutes les pertes du reste de l’année. Ce qui devient quasi impossible sur un marché où la Tunisie doit rester la moins chère des destinations soleil si elle veut séduire son public », ajoute le patron d’Alpitour. Les TO disent vouloir éviter la guerre des prix. Mais il faudra certainement faire avec cet été vu les offensives de Mondial Tourisme et de FTI Voyages. Et cela même si un gros acteur comme Jet tours a disparu.
« Nous voulons prendre des parts de marché », confirme Axel Mazerolles, directeur général de FTI Voyages. « Et on sait qu’en année de lancement avec des charters, on ne peut pas gagner d’argent. » « La Tunisie sera notre premier destination avec 100 000 passagers en vue contre 75 000 en 2019 », assure de son côté Selatt Erdogan, directeur commercial de Mondial Tourisme. Le TO qui voit grand et programme 4 Mondi Clubs ajoute des vols au départ de Belgique à ceux programmés de Paris, Lyon, Marseille, Nantes, Strasbourg, Toulouse, Bordeaux et Lille.
Des clubs qui doivent rassurer
La Tunisie souffre d’un autre écueil, souvent évoqué du bout des lèvres par les TO : celui de la qualité des produits. Beaucoup d’hôtels ont été désertés plusieurs années durant et après le printemps arabe. Ils ont manqué d’entretien et sont loin d’avoir retrouvé leur niveau de services antérieur. « C’est une des raisons pour lesquelles nous n’y avons pas ouvert de Kappa Club », convient Philippe Sangouard, directeur général de Boomerang Voyages qui commercialise néanmoins 3 Clubs Coralia.
Pour garantir la promesse et apporter de la réassurance aux agences et clients, les voyagistes misent en priorité sur leur offre clubs et des prestations maîtrisées. « Parce que nous nous lançons, nous n’avons choisi que des adresses bien connues du marché pour nos clubs FTI, soit le Télémaque à Jerba et le Président à Hammamet auxquels nous avons imposé nos standards », précise Axel Mazerolles. De son côté, Bravo Club a repris l’an dernier le Golf Beach à Jerba (un ancien Framissima). Voyamar (qui propose deux Naya Clubs ouverts toute l’année) communique de même sur des valeurs sûres y compris lorsqu’il élargit son offre de séjours avec le Rym Beach, le Djerba Aqua resort ou le One resort Aqua Park, tous trois ex-Jet tours.
Outre ses 6 clubs (3 Marmara, 3 Lookéa dont le nouveau One Resort El Mansour à Monastir), soit l’offre la plus généreuse du marché, TUI France met en avant ses hôtels et clubs TUI internationaux sous enseigne réputées telles TUI Blue, Magic Life, Splashworld ou Robinson Club. « Afin d’assurer la qualité, nous privilégions des partenaires de longue date, et notamment des chaînes hôtelières espagnoles dont nous accompagnons le développement en Tunisie », précise Samia Benslimane. Au total, 29 clubs sont programmés cet été sur le marché français.