La Cour de justice de l'Union européenne a rendu il y a quelques semaines un arrêt favorable à l'indemnisation complémentaire en cas de perte de salaire due à un retard d'avion. Une décision importante mais qui n'est pas nouvelle. Explications.
Par un arrêt rendu le 29 juillet, la Cour de justice de l'Union européenne a condamné une compagnie aérienne à verser une indemnisation complémentaire à deux voyageurs suite à un retard d'avion important. L'affaire jugée récemment remonte à 2016. Deux passagers de la compagnie Blue Air qui devait effectuer un vol de Bacău (Roumanie) à Londres le 6 septembre, n'avait pas pu embarquer suite à un changement d'appareil qui avait entraîné une réduction de la capacité des places à bord. Leur retour dans la capitale anglaise n'aura alors pu se faire que quelques jours plus tard, le 11 septembre.
Les deux voyageurs se sont d'abord vus offrir un billet d'avion gratuit puis une indemnisation de 400 euros par personne, après avoir jugé que l'obtention seule d'un billet gratuit n'était pas un geste suffisant au vu du préjudice subi. Les passagers lésés ont estimé qu'il y avait également un préjudice matériel. Tous deux ont en effet eu une retenue sur salaire suite à leur absence au travail. L'un d'eux a même dû faire face à l'ouverture d’une procédure de licenciement, finalement transformée en blâme.
Si la justice roumaine avait dans un premier temps rejeté la demande d'indemnisation supplémentaire, l'affaire portée devant la Cour de justice de l'Union européenne a finalement porté ses fruits. Cette dernière a en effet jugé que l'indemnisation prévue « ne vise pas à indemniser un préjudice tel qu’une perte de salaire (...) ce préjudice peut faire l’objet de l’indemnisation complémentaire » par le transporteur aérien. Une décision qui ne manquera pas d'inciter de nouveaux voyageurs à engager une procédure devant la justice pour obtenir des indemnités complémentaires.
Indemnisations forfaitaires et complémentaires
Mais cette décision de justice est-elle une vraie nouveauté pour les voyageurs ? Non, selon Emmanuelle Llop, avocate spécialiste en droit du tourisme : « Il n'y a rien de nouveau mais cet arrêt confirme qu'il y a une protection, la plus élevée possible, du passager ». Concrètement, il existe dans le droit français deux « étages » pour l'indemnisation. Les indemnisations forfaitaires d'abord, entre 250 à 600 euros, en cas de refus d'embarquement, d'annulation ou de retard important d'un vol. Puis les cas personnalisés, individualisés. « Les juges français vont alors pouvoir s'appuyer sur la Convention de Montréal pour régler le préjudice complémentaire. En se basant notamment sur le principe de prévisibilité », précise Emmanuelle Llop.
Le passager, lui, aura à prouver ce préjudice, à l'aide, par exemple, de ses fiches de salaires, pour demander cette indemnisation. Quant à la compagnie, elle devra prouver qu'elle a fait tout le nécessaire pour trouver une solution pour les passagers concernés. À noter que la responsabilité du transporteur est limitée, pour l'ensemble des indemnités, forfaitaires et complémentaires, à la somme de 4150 DTS (droits de tirage spéciaux), soit environ 5135 euros (au 28 août 2019). Difficile alors d'obtenir davantage en cas de perte de salaire sur plusieurs jours.