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Raouf Benslimane (Thalasso N°1/Ôvoyages) : « Le gouvernement doit sauver les entreprises du tourisme ! »  


Publié le : 29.09.2020 I Dernière Mise à jour : 29.09.2020
Raouf Benslimane (Ôvoyages) : "Les premières mesures ont mis tout le secteur du tourisme sous assistance respiratoire et là, on nous annonce qu’on va nous débrancher alors que notre état s’aggrave !"  I Crédit photo DR

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  • Propos recueillis par Marie Poirier

Le Président de Thalasso N°1/Ôvoyages Raouf Benslimane donne ici son opinion sans détour sur les mesures accordées aux entreprises du tourisme par le gouvernement français. Et les conditions d’une possible reprise du secteur. Entretien. 

Tour Hebdo (T.H.) : Quand prévoyez-vous une reprise d’activité pour les entreprises du tourisme ?
Raouf Benslimane (R.B.) : Pour des raisons évidentes de survie du secteur, l’activité doit reprendre en avril 2021. La majorité des reports 2020 est en effet prévue sur le printemps 2021. Il vaudrait donc mieux que nous n’ayons pas à reporter de nouveau. C’est un espoir puisque personne ne maîtrise totalement la situation et que selon les pays, la stratégie n’est pas la même. A supposer que la France passe de l’enfer au paradis, il faudrait que ce soit aussi le cas des autres pays.
Car le problème, c’est le manque d’harmonie et de mesures cohérentes à l’échelle européenne.
 
T.H. : Un vaccin peut-il être la solution ?
R.B. : Non, pas vraiment. C’est une erreur de penser ainsi et surtout de faire reposer une stratégie sur un vaccin. Ce n’est pas la solution ultime, car, même s’il était mis sur le marché, le vaccin connaîtrait au moins deux freins. Premièrement, combien de personnes accepteront réellement de se faire vacciner ? Surtout si le vaccin est fourni en un temps record comme plusieurs laboratoires le prétendent avec des incertitudes sur les effets à long terme. Deuxièmement, qui peut affirmer de façon certaine que même vaccinée une personne n’aura jamais le Covid quand on sait ce qu’il en est du vaccin anti-grippe ? J’estime donc que la reprise aura lieu si et seulement si les dirigeants européens se retrouvent autour d’une même table pour s’accorder et adopter des mesures communes d’accès et de contrôles aux frontières. Ce, pour permettre au plus grand nombre de voyager en réduisant au maximum le risque sanitaire. C’est bien entendu l'enjeu.
On doit agir avec une organisation adaptée en vue de se protéger. On ne peut pas nous demander de rester confinés tant que la menace d’être contaminés existe. Je vais oser une comparaison avec le terrorisme. Il y a quelques points communs entre le terrorisme et le virus. Les deux constituent une menace à l’intégrité physique des personnes. Les deux circulent parmi nous et peuvent survenir partout et à tout moment. Le mieux à faire est donc de réduire le risque au maximum en intégrant un paramètre constant : l’impossibilité d’atteindre le risque zéro. Cela n’engage évidemment que moi mais j’y crois dur comme fer, la gestion des deux situations doit être la même. On ne peut pas justifier dans le cas du Covid de confiner les personnes ou de stopper des activités. Et pas dans l’autre. Il faut mettre en place de normes sanitaires strictes contrôlées et uniformes à l’échelle européenne et mondiale. C’est ainsi qu’on combat une menace. Je prône là un discours fondé sur le bon sens et le pragmatisme. Pas besoin de se perdre en calculs infinis pour s’en rendre compte.  
En matière de terrorisme, par exemple, les aéroports ont tous mis des protocoles de contrôle visant à assurer la sécurité physique des personnes. C’est ce qui doit être fait pour le Covid pour enfin libérer les frontières, les personnes et les économies ! Cela passe par des contrôles automatiques de températures, le respect strict de la distanciation et surtout, la mise en place de tests et résultats immédiats avant décollage. On retrouvera ainsi le plaisir de voyager en toute sérénité si l’on remplit deux conditions : un passeport valide et un test Covid négatif. La cacophonie actuelle au niveau européen et mondial porte autant de préjudices à l’économie (et à notre industrie) que le Covid lui-même.
 

T.H. : Que pensez-vous des mesures de soutien accordées au secteur du tourisme ?
R.B. : Les mesures ont été fortes, positives et déterminantes. J’ai été le premier à m’en réjouir mais sur la durée, on voit bien qu'elles sont insuffisantes. Car on constate que même en déployant toute l’énergie nécessaire à notre survie, notre activité ne correspondra qu’à 20 - 25% de notre activité 2019. Il est donc impossible avec ce volume de générer une marge à même d'absorber tous les coûts.
La prise en charge de l’activité partielle n’est pas une faveur que l'état fait aux entreprises. C’est simplement pour que l'état ne paie pas demain les lourdes conséquences des plans sociaux.
Malheureusement, au moment où il faut passer la vitesse supérieure et donner de la visibilité aux entreprises de notre secteur pour sauver le maximum d’emplois, on nous annonce que la prise en charge du travail partiel va être réduite à 85% jusqu’à fin décembre. Soit en réalité 30% à charge pour les entreprises… ce qui va creuser davantage les pertes de tout le secteur.
Un restaurateur à qui l’on dit de fermer temporairement - comme c’est le cas à Marseille – voit son activité stoppée. De cet arrêt, découlent des mesures d’aides adaptées qui vont de l’exonération totale des cotisations sociales à la prise en charge à 100% de l’activité partielle. Cela devrait être la même chose pour notre secteur. Les frontières sont en grande partie fermées, l’activité est quasi à l’arrêt pour la plupart d’entre nous mais pourtant le traitement de la situation n'est pas le même.
Pire que cela, que fait aujourd’hui une agence de voyages qui demeure ouverte ? Principalement de la gestion de voyages reportés et de l’assistance commerciale (et psychologique) des clients. Nos équipes sont connectées aux agences partenaires qui souffrent et nous remontent leur désarroi. Nous souffrons de la même situation. En clair, même si l’agence de voyage va faire de temps en temps une réservation pour une destination et une date aléatoire, elle va en réalité engager plus de dépenses que si elle était fermée. Et qui dit agence de voyages, dit tour-opérateur, dit centrale de réservations, etc… 
Nous savons que l'activité ne reprendra pas après le 31 décembre 2020. Car les départs au-delà de cette date sont supposés pour partie avoir été réservés en ce moment. Et rien ne semble bouger actuellement. 
Les premières mesures ont mis tout le secteur du tourisme sous assistance respiratoire et là, on nous annonce qu’on va nous débrancher alors que notre état s’aggrave ! 
 
T.H. : Certains professionnels craignent que l’activité outgoing ne soit pas la priorité du gouvernement. Et vous ? 
R.B. : Il y a vraiment urgence à comprendre que l'outgoing représente des milliers d’emplois. Et que l’attelage tour operateur-agent de voyages fait voyager des millions de français et fait vivre (ou justifie le travail) de nombreuses professions périphériques (presse spécialisée, imprimeries, offices du tourisme, loueurs de voiture, etc…). Sans oublier les transporteurs comme Air France et Transavia.
N’oublions pas que cet attelage est représenté par des entreprises françaises contrairement à d'autres secteurs. Des entreprises dirigées par des personnes passionnées et très compétentes qui ne passent pas leur temps à faire de l’optimisation fiscale et qui paient impôts et cotisations en France. Aujourd’hui, ces entreprises sont menacées. Il est encore temps d'agir mais il faut aller très vite. 
J'exhorte donc les autorités à réfléchir et à prendre conscience de la relativité du coût des mesures urgentes à prendre. Ce, au regard des conséquences sismiques à éviter sur le plan économique social et financier pour des millions de français lesquels ne trouveraient plus qu’Airbnb, Google ou Amazon pour les faire partir en vacances... Ceux là-mêmes qui ne présentent aucune garantie ni expertise alors que le monde du voyage actuel offre un encadrement juridique, commercial et financier de l’ensemble des intervenants. C’est un monde organisé autour de valeurs et d’engagements qui allègent les responsabilités de l’état.
J'exhorte donc Monsieur Bruno Lemaire et Monsieur Jean-Baptiste Lemoyne qui ont démontré leur volonté et leur capacité d'actions et d’anticipation à aller jusqu'au bout de leurs efforts pour sauver les entreprises du tourisme. N’oublions pas que la France est la première destination touristique au monde.
  
T.H. : Comment envisagez-vous l’avenir d’Ôvoyages ? 
R.B. : Nous sommes des combattants et sommes habitués à gérer des catastrophes, même si celle-là est d'une ampleur incomparable et que nos nerfs sont mis à très rude épreuve. Nous sommes dans l'obligation d'agir à plusieurs niveaux avec l'humilité mais aussi l’esprit positif qu’impose cette situation pour affronter à la fois les difficultés mais aussi anticiper des jours meilleurs.
Comme je l’ai déjà indiqué, nous avons la chance d'opérer sur deux destinations majeures - la Grèce et les Canaries - qui nous ont permis de réduire les dégâts. Car elles sont totalement safe et présentent l’avantage de pouvoir voyager sans aucune contrainte. Aucun test n’étant demandé et la circulation étant totalement libres dans ces deux pays.
Mieux les Canaries ont contracté une assurance avec le groupe Axa pour a0ssurer tous les voyageurs et prendre en charge tous les frais d’hôtel, de soins et aussi de rapatriement en cas de Covid.
En tant que principal opérateur sur cette destination, nous avons donc convenu avec les autorités canariennes de relayer cette démarche exceptionnelle sur le marché français durant cet hiver pour permettre à toutes les agences de pouvoir faire partir leurs clients dès maintenant.
Nous voulons contribuer à générer de l’activité au sein des agences en communiquant sur la sécurité et la qualité. Car les clients sont nombreux à vouloir partir mais l’offre tend à se réduire comme peau de chagrin et en hiver, à part la montagne, on ne peut pas compter sur la France. Je vous laisse imaginer la simplicité des mesures sanitaires dans les remontées mécaniques.
En plus de notre offre, nous sommes concentrés actuellement sur notre organisation pour être plus efficaces et agiles afin de répondre au mieux aux demandes de nos partenaires. Tout en investissant dans des outils technologiques qui nous permettront d'adapter nos moyens humains mais aussi de réduire nos risques en affrètement même si nous tenons plus que jamais à garder notre modèle hybride basé sur les affrètements et l'offre pré-packagée. 
La société que nous avons le plaisir de diriger avec ma formidable épouse qui fait actuellement preuve d'un courage à toute épreuve à l’image de toutes nos équipes, est née après les évènements du 11 septembre 2001 pour apporter une nouvelle offre au marché, il naîtra donc à nouveau une offre inédite et repensée pour un marché post covid remodélisé.
 

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