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Economie

Ce qui vous attend en 2016 (2e partie) : les mesures gouvernementales pour les TPE et PME


Publié le : 08.01.2016 I Dernière Mise à jour : 08.01.2016
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Ce deuxième volet concerne les dispositifs du gouvernement pour aider les entreprises. CICE, baisse de charges, CIR, IS... : bilan et recommandations de patrons du tourisme.

Le paquet de mesures déployées par le gouvernement depuis trois ans constitue un "plus" selon les patrons du tourisme interrogés. Mais plutôt qu’un saupoudrage de dispositifs d’accompagnement, ils attendent plus de flexibilité structurelle du Code du travail. CICE, exonération et baisse de cotisations Urssaf, C3S, impôt sur les sociétés, simplification de la vie des entreprises, limitation des effets de seuil, crédit impôt recherche… Tour Hebdo a enquêté.

"Je n’ai pas construit mon business plan sur des mesures gouvernementales. Ce qui est proposé, je le prends volontiers, mais il n’y a pas d’effet déclencheur de ces dispositifs; ils nous aident mais ne sont jamais déterminants." Pierre Shreiber, le fondateur du TO BtoB online Sun Trade Travel, résume le sentiment général chez les patrons du tourisme vis-à-vis des mesures déployées par le gouvernement depuis 2013, à savoir la mise en place du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) puis la baisse de certaines charges patronales dans le cadre du Pacte de responsabilité et de solidarité en 2014 (lire lexique en fin d'article).

Depuis bientôt trois ans, le gouvernement tente de donner des gages aux entreprises, à grand renfort de déclarations aux TPE et PME, et de dispositifs censés libérer la croissance en desserrant l’étau des prélèvements et en simplifiant les procédures administratives. Quant on pose la question aux dirigeants du secteur de savoir quelles mesures contribuent à développer leur activité, le CICE est cité spontanément par la majorité d’entre eux. 

 

« Nous avons de grands besoins en technologie et en formation pour lesquels le CICE nous a permis de dégager des budgets plus conséquents plus vite. »

Patrice Caradec, Pdg de Transat France


 


Accélérer la transformation numérique


Pour Patrice Caradec, le Pdg de Transat France (Look Voyages, Vacances Transat), ce crédit d’impôt a permis de réaliser des investissements plus rapidement que prévu : "nous avons de tels besoins en technologie et en formation, deux postes qui vont de pair, que cela nous a permis de dégager des budgets plus conséquents plus rapidement, alors qu’il aurait fallu les étaler". Le groupe dit avoir ainsi récupéré environ 900 000 € au titre du CICE en 2015, dont 70 % sont réinvestis pour "accélérer la tranformation" du modèle du tour-opérateur, notamment à travers la numérisation.

Pour autant, plus que la création d’emplois, l’enjeu est "la préservation des emplois existants" reconnaît Patrice Caradec, qui précise être "dans une phase où la tendance est plutôt au non remplacement systématique de tous les départs". Un témoignage représentatif de la situation des entreprises dites traditionnelles du tourisme, qui ne génèrent pas ou peu d’embauches, voire qui procèdent à des ajustements de personnel. 

On est loin dans ce cas du bilan du gouvernement, qui fait état de "30 000 emplois créés grâce au CICE sur la seule année 2013", citant une estimation Insee, tous secteurs d’activité confondus. "A notre échelle, le CICE ne représente même pas le montant nécessaire à l’embauche d’un équivalent temps plein" souligne Pierre Shreiber, qui dit pourtant croire "à l’ecosystème général français et au fait d’avoir créé (sa) boite en France".

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De nouvelles compétences plus coûteuses

Dans les entreprises déjà bien installées et  en mutation, le CICE contribuent en revanche à transformer le modèle et à préserver l’emploi, quitte à opérer des changements de compétences. "On est obligé de recruter de nouvelles expertises, souligne Patrice Caradec, principalement sur le digital, les médias sociaux mais aussi le contrôle de gestion pointu, qui permet de piloter les canaux de vente très en amont". Une compétence qui se fait rare dans le tourisme, et qui coûte donc cher, selon le patron de Transat France. Le trafic management et l’amélioration du taux de conversion sont également des compétences très recherchées, qui impliquent des embauches plus coûteuses qu’auparavant.

Les entreprises traditionnelles ne sont pas les seules concernées par la nécessité de recourir à du personnel très qualifié, dans le webmarketing mais aussi dans le développement technologique. Ainsi, Frédéric Savoyen, le directeur général de MyTravelChic, un pure player pour qui "la transformation digitale n’est pas un sujet", reconnaît s’appuyer largement sur les accompagnements gouvernementaux pour recruter au service informatique. Il a recours à un dispositif en vigueur depuis de longues années et largement promu par le gouvernement actuel : le Crédit impôt recherche (CIR). "Pour en bénéficier il ne suffit pas de se lancer dans la création d’un site internet, il faut vraiment prouver que le projet est innovant, ce qui est relativement rare dans le voyage. Le dispositif est plutôt utilisé dans des domaines de la recherche scientifique, comme les biotech" précise Frédéric Savoyen.

Pour postuler au CIR, attention à ne pas confondre investissement dans la technologie et réelle innovation. Selon lui, la conception d’un nouvel outil de production de circuits sur mesure en ligne, ou encore la création d’un outil de retargeting personnalisé, a permis la récupération d’une partie du montant investi grâce au CIR. Ce dernier constitue une avance sur les impôts, qui peut être reportée lorsque l’entreprise ne dégage pas de bénéfice et n’est pas imposable. "Pour une entreprise comme MyTravelChic les dépenses liées à l’équipe informatique, aux techniciens externes (sous-traitance via une régie, ndlr), aux abonnements aux logiciels technologiques comme Amadeus, et aux investissements dans le développement de concepts innovants représentent entre 800 000 € et 1 million d’euros par an" estime le dirigeant. "La possibilité de passer le CIR en provision permet aussi d’améliorer le bilan" ajoute-il.

Le dispositif peut être combiné avec les services de la BPI (Banque Publique d’Investissement), qui peut financer l’investissement en R&D et donner un avis sur le caractère innovant des projets. "La BPI ne demande que ça", assure Frédéric Savoyen, qui croit savoir que le dispositif est sous-utilisé. "Si vous arrivez avec une expertise “à l’ancienne” revisitée par la technologie, il y a des chances qu’ils soient partants". D’autant que de la BPI s’intéresse particulièrement au tourisme, depuis l’annonce de la création d’un fonds dédié au secteur en octobre dernier. Il ne s’agit plus de la seule innovation, mais, dans le discours du moins, "d’accompagner tous les secteurs du tourisme", comme l’expliquait alors Fanny Letier, la directrice exécutive fonds propres PME pour la BPI. Le fonds promet d’accompagner les entreprises qui souhaitent "changer d’échelle, se transformer aux mutations digitales et sociétales, exporter leur savoir-faire à l’international ou réaliser leur transmission". 

 

« Au moment de créer l'entreprise, je me suis posé la question de l'expatriation. Finalement si le contexte général français est loin d'être parfait, il y a de nombreux aspects positifs. »

Pierre Shreiber, fondateur de Sun Trade Travel


 


Ouvrir un club représente plusieurs millions d’euros

Dans ce domaine, les chefs d’entreprises du tourisme demandent à vérifier les annonces sur le terrain, échaudés qu’ils sont, pour certains, par une première expérience décevante. C’est le cas de Helmut Stückelschweiger, le Pdg de Top of Travel : "la BPI fonctionne pour le secteur de l’hôtellerie, qui donne des biens en garantie, mais pas pour notre activité de TO. A ce titre elle se comporte comme une banque classique" déplore-t-il, dénonçant "des effets d’annonce".

Il reconnait au passage que sa demande, qui consistait à soutenir la croissance de l’entreprise en investissant dans le concept de club de Top of Travel, et "non à boucher un trou", date d’il y a deux ans. Le patron se dit prêt à retenter sa chance : "on souhaiterait changer de taille, or l’ouverture d’un club représente plusieurs millions d’euros, et nous devons aussi investir dans l’informatique. Il faut soutenir la croissance des PME".

Top of Travel devrait malgré tout embaucher cinq personnes en 2016. A ce titre, les 60 000 € récupéré en 2015 grâce au CICE constitue une "aide à l’embauche", plus que la baisse des charges liée à l’allègement des cotisations sur les petits salaires (lire lexique à la fin). "On parle toujours de baisse des charges, sans évoquer les “impôts dormants” qui se rajoutent à droite ou à gauche, et que l’on découvre au moment de la déclaration" estime Helmut Stückelschweiger. Et de citer la taxe sur la publicité et l’éco-taxe qui touchent les publications : "on paye deux fois sur les brochures, à la fin cela chiffre en millions d’euros" assure-t-il. Selon lui, "on donne d’un côté et l’on reprend de l’autre".

De même, le directeur de Top of Travel considère que l’annonce de la simplification des procédures administratives pour les entreprises n’est encore qu’un voeu pieu : "on est encore très loin du résultat, il reste beaucoup de formulaires. Au-delà des promesses, on attend des réalisations". Pour Pierre Shreiber, on manque encore de recul sur ses mesures. Il espère pouvoir à l’avenir "gérer une forte croissance avec des contraintes qui ne grossissent pas dans les mêmes proportions. Certaines relèvent de nos propres outils et de notre organisation, d’autres des mesures gouvernementales. Si l’intention est là de simplifier, alors on y arrivera" positive-t-il.



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Encourager la prise de risque pour créer de la valeur

Le dirigeant de Sun Trade Travel se veut pragmatique : "il faut jouer avec le cadre existant, même si la législation française est contraignante et le coût du travail élevé". Sa réponse aux contraintes ? Délocaliser une partie de son activité à l’Ile Maurice. Il a démarré il y a cinq ans avec 12 personnes dans l’île de l’océan Indien et 5 à Paris. "C’est la solution que j’ai trouvée dans un secteur dont les marge se compriment". Aujourd’hui, la parité est quasiment respectée, avec 18 personnes dans la capitale française et 20 à Maurice. "Au moment de créer l’entreprise, je me suis posé la question de l’expatriation. Finalement, si le contexte général français est loin d’être parfait, il y a de nombreux aspects positifs, notamment la présence de personnel créatif, impliqué, et qui bénéficie d’une forte expertise des métiers de service et d’une très bonne connaissance de la clientèle. C’est très important lorsque l’on fabrique des voyages". Il estime que la mentalité française consiste à toujours "véhiculer le verre à moitié vide, l’aspect dangereux ou ennuyeux des mesures", ce qui n’encourage pas "la prise de risque pour créer de la valeur". Et d’assurer que si le coût du travail baisse en France, il mettra "plus le curseur dans l’Hexagone" plutôt qu’à Maurice.

De son côté, Patrice Caradec attend "qu’on nous libère. Je sais qu’il n’est pas très populaire de dire cela, mais il faudrait un peu plus de flexibilité sur le marché de l’emploi". Le patron de Transat France donne l’exemple de la Suisse et de l’Allemagne, en situation de quasi plein emploi, même si la sécurité de l’emploi y est inférieure. "Dans ces pays, les gens sont moins paniqués à l’idée que l’on puisse mettre fin à une mission, car il retrouveront plus facilement un emploi". Il ajoute : "en France, on ne fait que défendre le consommateur et le salarié et on tue les créateurs de richesses. Rien n’est plus frustrant pour un patron ou un créateur d’entreprise que de ne pas créer d’emploi. Embaucher est un vrai facteur d’émulation. Le problème en France tient au fait que recruter est très engageant. On doit souvent se contenter de CDD ou avoir recours à l’externalisation, faute de quoi, lorsque l’activité recule, cela devient un coût".

Guy Zekri, le directeur général de Solea Vacances, évoque le fait que "l’on ne peut pas se séparer des gens qui ne travaillent pas bien" et dénonce "la gabegie de la formation professionnelle". Il suggère la mise en place du contrat de travail unique et l’augmentation de la TVA de 2 %. Pour Jean-Paul Chantraine, le Pdg d’Asia, il faudrait surtout réduire l’impôt sur les sociétés.

Pour autant, si les chefs d’entreprises appellent de leurs voeux des mesures de flexibilisation structurelle du code du travail, certains envisagent difficilement que les dispositifs en place, notamment le CICE, puissent disparaître un jour, comme l’avoue Jean-Pierre Lorente, le patron de Bleu Voyages : "Le CICE nous a fait gagner presque 300 000 euros au niveau du groupe, que nous avons en partie investi dans la rénovation d'agences. On espère que le crédit d'impôt ne s'arrêtera pas après 2017, car le réveil risque d'être brutal !". 

Pour l’heure, le gouvernement a annoncé la montée en puissance du CICE l’an prochain : l’allègement de la fiscalité induit par le dispositif devrait atteindre 18,5 Md€ contre 17,5 Md€ en 2014, et il devrait être porté à 19,5 Md€ en 2017, selon les dernières annonces de Bercy. Le projet de loi de finance 2016 prévoit également d’étendre l’exonération des cotisations versées aux URSSAF (lire lexique à la fin). Le ministère des Finances fait aussi valoir que les PME seront exemptées l’an prochain de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) grâce à la hausse de l’abattement, mêle si le gain maximal pour chaque entreprise ne dépassera pas 25 000 €.

Par ailleurs, Emmanuel Macron promet d’annoncer des mesures en janvier 2016 dans le cadre de son projet de loi sur les "nouvelles opportunités économiques" (Noé). De quoi, selon le ministre de l’Economie, adapter les structures de financement pour faire grossir les start-up, lancer la mutualisation des données pour profiter du big data, ou encore soutenir les secteurs traditionnels. Et contribuer à relancer la croissance ?

Dispositifs et évolutions

• Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) :
Selon le ministère des Finances, le CICE vise à "redonner des marges de manoeuvres pour investir, prospecter de nouveaux marchés, innover, favoriser la recherche et l’innovation, recruter, restaurer le fonds de roulement ou accompagner la transition écologique et énergétique grâce à une baisse du coût du travail". Lancé en 2013, les premiers montants ont été récupérés en 2014. Il est accessible à toute entreprise employant des salariés, et permet de bénéficier d’une économie d’impôt, reportable si l’entreprise ne réalise pas de bénéfice et n’est pas imposable. Selon Bercy, le CICE équivaut depuis 2014 à 6 % de la masse salariale (4 % en 2013), hors salaires supérieurs à 2,5 fois le SMIC (2 800 € nets par mois). Les montants récupérés par les entreprises doivent monter en puissance en 2016 et 2017.

Exonération et baisse de cotisation Urssaf :
Depuis le 1er janvier 2015, les entreprises sont exonérées des cotisations patronales versées aux Urssaf, hors cotisation d’assurance chômage, pour les salaires au niveau du Smic. Pour une entreprise avec 10 salariés au Smic, cela représente une baisse du coût du travail d’environ 4 000 € par an. Par ailleurs, une baisse de 1,8 point (soit de 5,25 % à 3,45 %) des cotisations familiales est appliquée pour les salaires allant jusqu’à 1,6 fois le Smic. Cette dernière disposition sera étendue en 2016 aux salaires compris entre 1,6 et 3,5 fois le Smic. 

Contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) :
Elle prendra fin en 2016. Cette mesure doit permettre d’éxonérer près de 80 000 ETI, seules les 20 000 plus grandes entreprises restant redevables de la C3S. Le gain maximale pour chaque entreprise s’élèvera à 25 000 €. Un premier abattement a été réalisé en 2015 pour les PME, qui représentaient les deux tiers des 300 000 entreprises initialement asujetties.

Impôt sur les sociétés (IS) :
La contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés prendra fin en 2016. Par ailleurs, le taux nominal de l’IS devrait baisser progressivement de 33 % actuellement, à 28 % en 2020, avec une première étape en 2017.

Simplification de la vie des entreprises :
Bercy a annoncé l’allègement des autorisations préalables à la création d’entreprises, le principe de non rétroactivité fiscale, l’accès plus facile à la commande publique, et la déclaration sociale nominative. Un paquet de mesures qui visent à simplifier les normes et obligations pesant sur les entreprises. La facturation électronique doit entrer en vigueur en 2017. Par ailleurs, la création d’un régime unique de la micro-entreprise entend "harmoniser et simplifier les régimes de l’entreprise individuelle", en "facilitant l’accès au régime de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL)".

Limitation des effets de seuil dans les TPE et les PME :
Le projet de loi de finance 2016 prévoit l’harmonisation et le relèvement à 11 salariés des seuils de 9 ou 10 salariés pour les prélèvements fiscaux, "afin de limiter les effets de seuils d’effectifs de certains régimes fiscaux et d’inciter à l’embauche", souligne Bercy. D’autre part, le ministère prévoit de limiter les effets de seuils pour les entreprises de moins de 50 salariés, pour certains prélèvements fiscaux. 

Crédit impôt recherche (CIR) :
Mesure de soutien aux activités de recherche et développement (R&D) des entreprises, sans restriction de secteur ou de taille, créée en 1983. Les entreprises qui engagent des dépenses de recherche fondamentale et de développement expérimental peuvent bénéficier du CIR en les déduisant de leur impôt sous certaines conditions. Depuis janvier 2013, son taux est égal à 30 % des dépenses éligibles. 

Dossier complet à télécharger en PDF ici.

Virginie Dennemont

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