Le nombre de victimes est en forte hausse alors que le nombre de sinistres reste stable, voire est en diminution.
A trois jours de la fin de l’année 2014, l’accident d’Indonesia AirAsia (QZ8501) est venu endeuiller le transport aérien, déjà très touché par des accidents atypiques comme la disparition inexpliquée d’un avion malaisien et la destruction d’un autre par un missile.
En mer de Java, entre Surabaya, deuxième ville d’Indonésie, et Singapour, se poursuivent les recherches des débris et des corps des 162 victimes du crash de l’Airbus A320 d’Indonesia AirAsia. Elles sont gênées par une mer difficile avec des creux de plus de trois mètres. Les morceaux de l’épave avec les précieuses boîtes noires gisent pourtant à faible profondeur, de l’ordre de 30 mètres, mais les courants et la faible visibilité due à la vase rendent le travail des robots difficile en attendant que l’état de la mer permette à des plongeurs d’intervenir directement.
Crash d'AirAsia : les spéculations vont bon train
Les spéculations vont bon train sur les causes de l’accident survenu dans des conditions météorologiques difficiles (mousson humide). Toutefois, six autres avions de ligne volaient dans la région au même moment, sans problème. La lecture des enregistreurs de vol tranchera, mais les débris et les corps repêchés peuvent déjà apporter des informations sur les circonstances de l’accident, dans la mesure où les autorités indonésiennes souhaitent les révéler. Ces dernières brouillent les pistes en déclarant que l’avion a givré et qu’il n’était pas autorisé à voler sur cette airway ce jour-là, une affirmation qui va à l’encontre des autorisations données par les contrôleurs aériens indonésiens et singapouriens.
Les autorités indonésiennes ont d'ailleurs ordonné aujourd'hui la suspension de responsables de la navigation aérienne dans le cadre de l'enquête sur le crash, et promis d'agir contre toute compagnie aérienne intérieure enfreignant les permis de vol.
Notons que cet accident touche un avion indonésien, et non pas malaisien comme cela a été parfois indiqué, même si le propriétaire du groupe AirAsia est malaisien. On sait que l’aviation civile indonésienne est blacklistée par l’Union européenne, faute d’assurer la tutelle et le suivi de sécurité de ses compagnies aériennes selon les règles internationales. Des accidents précédents avaient révélé l’étendue de la corruption des autorités locales. Des dérogations après des audits sévères ont toutefois été accordées par Bruxelles à la compagnie nationale Garuda et à Indonesia AirAsia.
4 crashs majeurs en 2014
2014 n’est pas réellement une année noire du transport aérien, même si les crashs majeurs d’Indonesia AirAsia (QZ8501), d’Air Algérie (AH5017) et de Malaysia Airlines (MH370 et MH17) inciteraient à conclure ainsi. La réalité statistique est différente. Selon le décompte effectué par l'organisation Aviation Safety Network, il y a eu l'an dernier 21 accidents meurtriers lors de vols commerciaux, faisant 694 victimes ; la moyenne annuelle de ces dix dernières années est de 32 accidents et 676 morts.
La diminution du nombre d’accidents par an montre l’efficacité des mesures de sécurité prises au niveau mondial. Sur vingt ans, la courbe du nombre de victimes, en dents de scie, affiche néanmoins une nette tendance à la baisse avec des pics les mauvaises années, comme 2014 ou 2010, et des creux, comme en 2013.
La hausse du nombre de victimes en 2014 tient aussi à l’arrivée d’avions de plus grande capacité et, par ailleurs, par un remplissage toujours plus important des appareils, qui affichent régulièrement 85% d’occupation. L’an dernier, deux accidents (MH370 et MH17) ont fait à eux seuls 537 victimes. Et on compte, avec les accidents des AH5017 et QZ8501, quatre crashs d’avions transportant plus de 100 passagers.
MH370 : le mystère reste entier
2014 est une année qui fera date car un accident, celui du MH370 Kuala Lumpur-Pékin, reste encore inexpliqué à ce jour, l’avion ayant totalement disparu sans qu’une explication rationnelle ne puisse être avancée. Cette disparition du MH370 a toutefois incité les autorités internationales de l’aviation civile à améliorer la traçabilité des vols notamment au-dessus des océans. Des compagnies appliquent déjà les recommandations, comme Air France, où les avions sont programmés pour transmettre automatiquement des messages de positions dès qu’une interruption des télécommunications dépasse dix minutes ou qu’un écart significatif par rapport à la route du plan de vol est noté.
LIRE : Quel avenir pour Malaysia Airlines ? (21 juillet 2014)
Autre accident d’une catégorie très particulière, celui du MH17 Kuala Lumpur-Amsterdam, descendu par un missile dont on ne sait encore s’il a été tiré du sol ou par un avion de chasse. Il y a eu de rares précédents (Korean Air Lines en 1983, Iran Air en 1988) d’avions civils abattus dans le cadre d’opérations militaires. Là aussi, l’aviation civile internationale prévoit de mieux informer sur les zones à ne pas survoler.
Le trafic mondial de passagers – plus de 3 milliards par an – continue de croître. Le nombre total de passagers a augmenté de 5,8% de janvier à octobre, a indiqué l'Association internationale du transport aérien (Iata). Le taux d'accidents a été de 0,29 par million de vols pour la période janvier-avril 2014, contre 0,48 accident en moyenne sur les cinq années précédentes.
Le directeur général de Iata, Tony Tyler, estime que le "but ultime" est d'être capable de prévoir les accidents potentiels et de s'assurer qu'ils ne se produiront pas. 2014 dérange néanmoins les spécialistes de la sécurité aérienne car les causes de la disparition du MH370, le plus grave accident en termes de victimes, ne sont pas connues et ne permettent donc pas d’édicter des mesures pour éviter qu’il ne se reproduise.
T.V.