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Transport

aérien - Baisse du prix du pétrole : c'est l'omerta sur la taxe carburant


Publié le : 01.12.2014 I Dernière Mise à jour : 09.10.2024
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Les compagnies aériennes, toujours promptes à hausser le prix du billet, n’envisage pas de le baisser alors que le prix du baril s’effondre, à moins de 70$ le baril aujourd'hui.

Avez-vous idée du nombre de mails qui n’arrivent pas, de personnes en vacances, d’autres malades, quand un journaliste lance une enquête sur un sujet qui, à priori, fâche ?

A l'heure d'évoquer la surcharge carburant YQ des billets d’avion, beaucoup d’interlocuteurs sont aux abonnés absents, au mieux en réunion, au pire en voyage. Bref, personne ne veut réellement expliquer pourquoi, quand le cours du baril de Brent baisse en cinq mois de 115 à moins de 70 dollars (68 dollars aujourd’hui 1er décembre), le montant de la surcharge carburant ne suit pas la même tendance.

Pourtant, le gazole comme le SP95 ou 98 aux pompes du supermarché baissent régulièrement. Et, après la réunion des pays producteurs au sein de l’OPEP, cette tendance ne sera pas enrayée. Une baisse de la production globale, demandée par le Venezuela, qui aurait entraîné une hausse des cours, a été refusée. Les baisses à la pompe vont donc se poursuivre.

Certes, il faut prendre en compte un double phénomène qui se contrarie. Alexandre de Juniac a expliqué récemment que les bénéfices potentiels liés au récent repli des cours du pétrole étaient limités par la parité euro/dollar. "La baisse de l'euro compense environ 40% de la baisse du prix du baril". 

Par ailleurs, Air France-KLM dispose d'instruments de couverture qui protègent le groupe contre environ 60% des variations du prix du kérosène. En clair, la compagnie dont le carburant représente 30 à 35% des coûts, s’est protégée à un cours moyen de 109 dollars. Pas vraiment un bon choix mais ce genre de spéculation financière relève souvent du poker, comme le montrent les gains et les pertes passées. En revanche, la Bourse salue l’effet carburant sur les comptes. Tombée au plus bas au lendemain de la grève des pilotes, l’action a repris 42% récemment.

Tarif indexé à la tête du client plus que sur le cours du Brent

Au fait, quelle surcharge carburant ?, nous dit-on dans les grandes compagnies. Celles-ci l’ont rebaptisé pudiquement "surcharge transporteur", comme nous l’explique Lufthansa ou Air France tandis que British Airways botte en touche.

"Cette surcharge transporteur est une composante à part entière de notre stratégie de prix, et son montant peut dépendre de plusieurs facteurs : distance du voyage, cabine de transport, voyage en correspondance ainsi que notre stratégie pour maintenir notre compétitivité tarifaire.

Cette composante évolue donc régulièrement selon les secteurs de notre réseau, à la hausse comme à la baisse."
indique Air France où elle est chiffrée entre 200 et 400 euros selon les cabines et les destinations en long courrier. Elle a disparu en court-courrier pour rester en adéquation avec la politique des low cost.

Même son de cloche chez Lufthansa où la surcharge fluctue entre 15-60 euros pour les vols continentaux et à 80-200 euros pour les vols long-courriers. "Le prix des billets Lufthansa sont fixés selon la demande dans chaque marché. Une baisse d’un des coûts externes (frais d’aéroport, pétroles, taxes…) ne résulte pas forcément en une baisse des tarifs, ces tarifs étant ajustés au jour le jour pour rester compétitifs" explique la compagnie d’outre-Rhin.

Si on lit bien entre les lignes, le tarif est indexé plus à la "tête du client" que sur le cours du Brent. A Air France comme à Lufthansa, la politique de surcharge souffre de nombreuses exceptions. Elle n’est pas appliquée dans certains pays comme aux Etats-Unis ou pour les passagers de certains pays en correspondance. En dernier ressort, c’est l’offre concurrentielle ("compétitivité tarifaire", "tarifs compétitifs") qui a le dernier mot.

Les compagnies françaises suivront Air France

Y a-t-il entente ? On ne le sait, à moins qu’une enquête ne soit lancée comme cela a été le cas pour le fret aérien où une entente, découverte en 2007, avait perduré de 1999 à 2006. Elle portait sur le montant de surtaxes pour le carburant ou la sécurité et l’affaire vient d’être relancée par une plainte de la Deutsche Bahn.

En France, les autres compagnies (Air Caraïbes, XL Airways, Air Austral, Corsair, etc.) avouent qu’elles suivront une baisse si la compagnie nationale la pratique. Au niveau européen, voire mondial, on joue une partie de poker menteur. Personne ne veut baisser la surcharge, mais tout le monde baissera si une première compagnie donne le signal. La vraie question est de savoir quelle opinion publique sera la plus puissante pour lancer le mouvement.

Emirates a le mérite d’afficher une position claire vis-à-vis d’une surcharge, variable selon les destinations et les classes (Moyen-Orient 122-285 euros, Inde 137-295 euros, Chine 157-330 euros, Australie 215-400 euros). "Une baisse de la surcharge carburant liée aux cours du pétrole, n’est pas envisageable car, en ne survolant plus l’Irak ou la Syrie, nous augmentons le temps de vol vers la France d’environ vingt minutes", indique Thierry Antinori, numéro deux de la compagnie de Dubaï.

Japan Airlines ne joue pas sur les mots et se révèle exemplaire en affichant sur son site internet les conditions de la baisse comme de la hausse (www.fr.jal.com).

Problème du non-remboursement des surcharges

En matière d'hypocrisie, les low cost se battent pour monter sur le podium. Transavia annonce avoir supprimé la surcharge depuis deux ans. Un discours à la Ryanair ! Certes, la taxe YQ n’apparaît pas sur le billet de la compagnie irlandaise. Mais comme le nombre de sièges à premiers prix a été réduit au profit de ceux plus chers, globalement la recette du vol, payée par les passagers, augmente.

Anne-Sophie Tercera, au service juridique de la Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports, insiste sur l’opacité de la surcharge carburant : "L’appellation parfois utilisée de "taxe carburant" est source d’incompréhension pour les voyageurs. Elle n’est pas encadrée par la loi. Son calcul n’est pas clairement défini et dépend de chaque compagnie. C’est également un sujet de discorde entre compagnies et tour-opérateurs ou agences de voyages. Evidemment, lorsque le prix du baril baisse, la surcharge devrait logiquement baisser, mais aucune contrainte juridique ne peut être opposée aux compagnies aériennes pour aboutir à ce résultat (sauf dans le cadre des voyages à forfait - article L211-12 Code tourisme). La baisse corrélée à la baisse du prix du baril relève du bon sens."

Il n’y a pas que le montant de la surcharge carburant qui est contesté. De nombreux litiges gâchent la vie des agents de voyages et de leurs clients dès qu’il faut en obtenir le remboursement quand un voyage est annulé. Les surcharges ne sont pas remboursables si le billet n'est pas remboursable, indique Air France.

Dans la réponse à une question écrite de la députée Virginie Duby-Muller, le ministère des Transports reconnait que "la surcharge carburant est assimilée à tort à un prélèvement obligatoire, qu’elle ne constitue pas une taxe mais un élément du billet entrant dans la composition du tarif demandé au passager, son remboursement dépendant des caractéristiques du billet acheté dans le cadre du contrat de transport". Et ça, il faudrait que cela change...

Thierry Vigoureux

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