Depuis hier soir, le ministère appelle les Français à être vigilants partout dans le monde, plutôt que seulement dans 43 pays.
Le Quai d'Orsay a changé son fusil d'épaule. Alors que le ministère demandait aux Français de "renforcer leur vigilance" dans 43 pays (essentiellement musulmans) "dans le contexte de l'intervention internationale contre Daech", les conseils ont évolué hier soir.
Désormais, cette mention a disparu des fiches des 43 pays en question (dont le Maroc, la Tunisie, mais aussi la Malaisie…), remplacée par une mention générale invitant les Français à "faire preuve de vigilance lors de leurs déplacements à l’étranger", sans aucune précision de pays jugés plus à risques que d'autres.
Ce qui apparaissait avant, sur la fiche de chacun des 43 pays :
Ce qui apparaît aujourd'hui, une seule fois sur la home page des Conseils aux voyageurs :
Voilà qui semble en effet plus logique, car comment expliquer qu'un Français était potentiellement plus en risque au Qatar, dont la carte de sécurité est totalement verte, qu'aux Etats-Unis, membre de la coalition internationale qui lutte contre Daech ? Ou même qu'à Paris (qui relève toutefois du ministère de l'Intérieur, et pas du MAE)…
La cerise sur le gâteau est tunisienne : alors qu'elle faisait partie hier encore des pays sur lesquels le MAE appelait à renforcer sa vigilance, les élections ont amené un autre changement sur la fiche pays des Conseils aux voyageurs. "La transition démocratique et la stabilisation de la situation politique et sécuritaire en Tunisie créent un contexte favorable aux projets de déplacements touristiques ou professionnels dans le pays", peut-on lire depuis ce matin.
"Le fruit d'une concertation avec les professionnels du tourisme"
L'évolution de ces conseils aux voyageurs est une bonne nouvelle pour les professionnels du tourisme, qui avaient rencontré Laurent Fabius à ce sujet vendredi dernier. "Nous avons été entendus, commente René-Marc Chikli, président du Seto. Cette évolution des conseils aux voyageurs est le fruit d'une concertation entre les professionnels réunis, le Seto, le Snav, la Fnam, le Bar, et le ministère des Affaires étrangères."
De quoi rassurer les clients, qui avaient surtout été inquiétés par la reprise dans les médias grands publics de cet appel à renforcer sa vigilance. Ces derniers avaient pour beaucoup pris le parti de montrer des cartes sur lesquelles les pays apparaissaient en rouge, c'est-à-dire la couleur des pays où les déplacements sont "formellement déconseillés" ? Il est certain que le choc de l'assassinat d'Hervé Gourdel, couplé à ces alertes du MAE, avait donné un sérieux coup de frein à l'économie du secteur.
Pour le patron du Seto, l'évolution des conseils aux voyageurs "peut faire repartir les ventes pour Noël. On devrait pouvoir plus facilement rassurer les clients, que ce soit en BtoB, en BtoC, en individuel mais aussi en groupes, pour les congrès, les incentives…" En espérant que les ventes reprennent. "Les clients ont la mémoire courte, et ils ont surtout envie de voyager", assure René-Marc Chikli.
L'évolution de ces conseils aux voyageurs devrait aussi sans doute faciliter la tâche de la diplomatie française, qui a dû faire face au mécontentement et à l'incompréhension des pays sur lesquels l'appel à "renforcer sa vigilance" étaient publié. La sortie du ministre de l'Intérieur du Maroc, récemment (lire notre article), en dit long sur les conséquences de cet appel peut-être un peu rapide lancé par le MAE en septembre.
Caroline Revol