La Cour des comptes dit stop au développement du TGV, en préconisant une suppression d'arrêts intermédiaires et des dessertes sur voies classiques.
Dans son rapport de 174 pages publié le 23 octobre, la Cour des comptes a tiré à boulet rouge sur le système ferroviaire à grande vitesse en France, qui est arrivé en bout de voie.
La faute à la stagnation des trafics, à des remplissages en recul sur certaines lignes, à la surestimation de la rentabilité des LGV, à la multiplication des arrêts intermédiaires (avec 230 destinations recensées au total) et au choix de faire rouler les TGV sur le réseau classique, ce qui réduit considérablement la vitesse et donc le gain de temps.
La Cour critique au passage le secret entretenu par la SNCF sur la réalité de ses trafics. Elle note ainsi que "la marge opérationnelle de l’activité TGV s’est sensiblement dégradée, de 29% du chiffre d’affaires en 2008 à 12% en 2013".
Et de rappeler que l’essor du réseau TGV s’est effectué au détriment du réseau classique qui a vu ses lignes fermer, la qualité de service baisser et son entretien se réduire fortement avec tous les risques que l’on connaît. En raison de tarifs jugés élevés, une partie de la clientèle loisir de la SNCF s’est en outre détournée du TGV pour utiliser d’autres modes de transport, comme l’autocar et le covoiturage.
Les futurs projets de LGV sont jugés non prioritaires
Et la Cour de souligner que les projets en cours sont loin d’avoir une rentabilité assurée. Ils seraient lancés contre toute logique en raison du processus actuel de décision très balisé et coûteux, entre débats préalables et études préliminaires, études techniques et avant-projet.
"La somme de ces dépenses finit par justifier le lancement de l’opération, parfois contre tout bon sens", estime les magistrats. Les futures LGV Tours-Bordeaux, Bordeaux-Toulouse et Poitiers-Limoges sont ainsi pointées du doigt, d’autant que plusieurs de ces projets ne sont pas financés avec la baisse des ressources.
Cette situation ne devrait que s’aggraver avec l’abandon de l’écotaxe annoncé récemment par Ségolène Royal, la ministre de l’Ecologie et du Développement durable. En effet, la taxation du diesel à hauteur de 2 centimes par litre en 2015 prévue en remplacement n’aura pas le même rendement. Les moyens de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) en seront durablement impactés, selon le rapport.
Entretenir le réseau actuel plutôt que lancer de nouveaux projets
Pour relancer les trafics TGV, la Cour des comptes recommande donc d’intégrer ces liaisons avec le réseau ferroviaire classique mais aussi avec les nouvelles offres alternatives de transport. Le transport en bus serait une alternative alors que le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, entend proposer un projet de libéralisation des transports par autocar dans l'Hexagone.
Elle recommande surtout de diminuer progressivement "le nombre d’arrêts sur les tronçons de LGV et de dessertes sur voies classiques et extrémités de lignes".
Ces recommandations risquent d’inquiéter nombre d’élus dans les régions mais aussi les voyageurs habitués au fil des années à cette facilité offerte par la multiplicité des dessertes et fréquences TGV. Et la Cour d’enfoncer le clou : "Ne doivent être conservées que les dessertes justifiées par un large bassin de population". Un impératif absolu pour garantir des taux de remplissage élevés et la rentabilité de chaque desserte.
Stéphane Jaladis