Menu
S'identifier
Hébergement

Pourquoi le Club Med doit changer de cap, selon Claude Chailan (EM Strasbourg)


Publié le : 01.09.2014 I Dernière Mise à jour : 01.09.2014
Image
I Crédit photo Claude Chailan, professeur à l'Ecole de Management de Strasbourg, a réalisé une étude de cas sur le Club Med ©DR

Professeur en stratégie et marketing à l'Ecole de Management de Strasbourg, Claude Chailan n'est pas tendre avec l'orientation suivie par Henri Giscard d'Estaing depuis 10 ans. Interview.

Dans une tribune parue dans Les Echos le 22 août, vous déclariez être favorable à la contre-OPA de l'Italien Bonomi. Au-delà de surenchérir sur l'offre de Fosun et Ardian, quels sont ses atouts selon vous?

Cela ne peut pas être pire! Si l'on cumule les pertes et les gains réalisés par le Club Med sur les 11 dernières années, on atteint 350 M€ de pertes... Sur la période, l'offre a été destructurée, passant de 185 à 77 Villages, et l'on se gausse aujourd'hui de l'ouverture d'une poignée de Villages par an. Dans ces conditions, n'importe quelle offre sensée vaut mieux que la voie suivie par d'Henri Giscard d'Estaing (l'actuel Pdg, ndlr), qui s'est éloigné des racines de la marque.

Ces mêmes racines avaient été fortement mise en cause dans les années 2000, avec le constat, pour résumer, que l'ambiance "Bronzés" et les infrastructures pas toujours à la hauteur, ne correspondaient plus à l'attente des clients. La montée en gamme n'était-elle pas la bonne option pour le Club?

S'orienter vers le luxe a pu constituer une option, mais on peut reprocher à l'actuelle direction de ne pas avoir fait machine arrière en constatant, après trois ou quatre ans sans résultat, qu'elle faisait fausse route. Le Club Med doit se souvenir de ses racines populaires et de sa simplicité d'origine, et s'orienter plutôt vers le "premium". L'erreur a été de croire que l'entreprise pourrait capitaliser sur sa marque dans un univers, le luxe, qui n'est pas le sien. Il ne suffit pas d'augmenter les prix pour se revendiquer luxueux. Aujourd'hui le Club Med ne peut pas rivaliser avec les infrastructures et le service des resorts de luxe.

Monter en gamme prend du temps. Le moment n'est-il pas enfin venu de récolter les fruits des rénovations de Villages?

Si on veut être Hermès, il faut effectivement du temps, et de l'argent. Or le Club Med n'a pas les moyens de ses ambitions. Le diagnostic réalisé en 2003 était erroné et le pari a échoué. Le luxe consiste, par nature, à mettre en évidence votre différence, ce qui est contraire à l'ADN du Club, dont la marque de fabrique est la table d'hôtes partagée, l'abolition des classes sociales... A ce titre, créer des espaces 5 tridents luxe à l'intérieur de Villages 4 tridents est la mesure la plus anti-Club qui soit. Fermer les clubs 3 tridents a aussi été une erreur : ils permettaient à la clientèle jeune ou pas suffisamment aisée pour les 4 et 5 tridents d'accéder à l'offre, quitte à s'offrir ensuite des Villages plus sophistiqués. Les 3 tridents étaient le meilleur moyen de convaincre les clients de monter en gamme. Qu'est devenue aujourd'hui la clientèle des familles?

L'actuelle direction du Club Med prétend avoir anticipé la perte des "petits clients", notamment français, et miser sur les clientèles émergentes à plus fort pouvoir d'achat...

Dans la mythologie française le Club Med représente encore quelque chose d'extraordinaire. Mais c'est devenue une affaire franco-française. J'enseigne beaucoup à l'étranger, et le Club n'est pas connu des jeunes Chinois de 20 à 25 ans habitant à Chengdu par exemple, une ville de 12 millions d'habitants! Idem dans la première université de Bogota en Colombie, où seuls 2 étudiants sur 38 connaissaient la marque. Hors de France, tout reste à faire.

En quoi l'offre de Bonomi, dont la stratégie pour le Club n'a pas été vraiment détaillée pour le moment, peut-elle mieux faire?

L'intérêt de cette offre est de faire preuve de beaucoup de lucidité en capitalisant sur le vrai savoir-faire du Club Med pour offrir un produit sympathique, assez chic, à un prix raisonnablement élevé, mais pas dans l'univers du luxe. Aujourd'hui, c'est de vitesse et d'accélération dont le Club a besoin : il faut relancer le développement des Villages pour donner à nouveau accès au monde. Le choix était l'une de ses promesses. Il faut aussi améliorer le site internet, qui est très mal fait. L'offre de Bonomi présente au moins le mérite de redonner un espoir. Quand quelqu'un est prêt à mettre plus de 650 M€, on peut espérer qu'il va tirer parti de la marque, ne serait-ce que pour récupérer ses billes.

A vous entendre décrire ce qui représente selon vous un fiasco ces 10 dernières années, est-il encore temps de sauver le Club?

Il reste au Club Med de formidables atouts, des sites exceptionnels, la convivialité, le concept du tout compris même s'il a été beaucoup copié depuis... Quant à la valeur de la marque, elle est supérieure au montant de l'offre. La vraie question est la capacité d'investissement du prochain actionnaire : il faudra plus que ce qui a déjà été fait pour relancer l'entreprise, et le chiffre annoncé aujourd'hui par Bonomi, qui a évoqué quelques dizaines de millions d'euros d'investissements pour réactiver la marque, me semble très insuffisant.

Propos recueillis par Virginie Dennemont

Div qui contient le message d'alerte

Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire

Mot de passe oublié

Déjà abonné ? Créez vos identifiants

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ? Remplissez les informations et un courriel vous sera envoyé.

Div qui contient le message d'alerte

Envoyer l'article par mail

Mauvais format Mauvais format

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format

Div qui contient le message d'alerte

Contacter la rédaction

Mauvais format Texte obligatoire

Nombre de caractères restant à saisir :

captcha
Recopiez ci-dessous le texte apparaissant dans l'image
Mauvais format