Le dialogue entre la ministre de l'Artisanat et du Tourisme du Mali et les TO français a tenu ses promesses ce matin. A l'arrivée, un débat poli mais sans tabou !
Dans la foulée du sommet France-Afrique à Paris, la ministre de l'Artisanat et du Tourisme du Mali, Berthé Aissata Bangali, a rencontré ce matin les professionnels du tourisme français pour évoquer les conditions de la relance du tourisme au Mali. Et les débats ont été courtois mais vifs !
"Il faut désormais redonner des couleurs à la destination Mali", a martelé la ministre, qui a présenté les principales actions et pistes envisagées pour remettre le tourisme malien sur les rails. La relance devrait passer par un accent mis sur la promotion de la destination mais aussi par une diversification des produits touristiques. Tout en reconnaissant que la situation n'est pas encore stabilisée à Kidal, dans le nord du Pays, la ministre du Tourisme souhaite mettre en avant le sud, l'ouest et le centre du pays, notamment les régions de Kayes et de Sikasso. "Il n'y a absolument aucun problème de sécurité dans ces régions", assure Berthé Aissata Bangali, qui veut par ailleurs viser de nouvelles cibles, en particulier le tourisme scolaire et universitaire ainsi que la diaspora malienne. Mais la ministre a aussi et surtout lancé un appel aux TO français pour qu'ils reprogramment et poussent la destination. "C'est maintenant qu'il faut venir et agir : c'est un geste de solidarité envers un secteur en détresse", a insisté Oumou Dembélé, chef de cabinet du ministre.
Une carte en rouge et orange
La réponse des TO présents ne s'est pas fait attendre : si tous ont marqué leur attachement à la destination, les chefs de produits et directeurs de production restent dans l'expectative, en particulier à cause de la classification du pays en rouge et orange par le Quai d'Orsay. "Les clients regardent les Conseils aux voyageurs du ministère des Affaires étrangères français et cela bloque tout", avance Frédérique Ribeaucourt, du groupe Point-Afrique, qui "attend la couleur verte sur le Pays dogon". Même constat pour Gérard Neveu, chez Allibert : "Tant que cette classification n'évolue pas, on ne pourra rien faire", affirme-t-il. Et ce n'est pas la diversification vers Kayes ou Sikasso qui va permettre de relancer le Mali, selon les TO. Elisabeth Léonide, une réceptive qui tente aujourd'hui de reprendre ses activités à Mopti, ne mâche pas ses mots : "On a tous essayé Kayes et Sikasso, cela n'intéresse pas les clients, tranche-t-elle, ce qui marche au Mali, c'est le triangle d'or Tombouctou, Pays dogon, Djenné".
Parmi les facteurs bloquants, les TO pointent aussi du doigt le coût du visa : "Qui va payer 70 € pour aller au Mali aujourd'hui ?" interroge Elisabeth Léonide. Elisabeth de Joussineau, directrice de production Afrique chez Explorator, va encore plus loin : "Même si on reprogramme la destination, on a peu de demandes", regrette-t-elle. La faute à une image entachée par les opérations militaires de l'année écoulée. Une situation que Elisabeth Léonide résume en une phrase : "Il y a dix ans, quand on parlait du Mali, personne ne savait où c'était, alors que, maintenant, tout le monde le sait mais pour des raisons pas très positives", constate-t-elle.
Face à ces interventions franches, Berthé Aissata Bangali se montre en tout cas lucide sur le retour à la normale du tourisme malien : "Cela prendra du temps pour retrouver une bonne image touristique comme c'était le cas ces dernières années", confie-t-elle. Le chemin du redressement est encore long.
Didier Forray